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3/31/2013

Le transfert psychanalytique en question



Le transfert est au cœur de la cure psychanalytique. Découvert par Freud, ce concept qualifie la relation particulière qui unit le patient à son analyste. Zoom sur sa définition, ses vertus et ses éventuelles dérives avec le psychiatre et psychanalyste Juan David Nasio.

"Avant d'être un élément crucial de la cure analytique, le transfert est avant tout un phénomène humain qui s'éprouve à des degrés variables dans les relations entre les individus" précise le psychanalyste Jean David Nasio, avant d'aborder l'aspect psychanalytique. En tant qu'étudiant, vous avez pu par exemple reproduire, sans en être conscient, une affection particulière sur le professeur de philo, parce qu'il parlait formidablement bien… "Peut qu'être qu'enfant vous étiez très attaché à votre oncle qui vous racontait des histoires fantastiques" suggère le psychanalyste. Il s'agit déjà d'un transfert.

Le transfert se définit par le report du passé au présent de sentiments que nous avons vécus enfants vis-à-vis des êtres aimés, ou des proches. Ces émotions rejaillissent dans le présent, telles que nous les avons imaginées, ou fantasmées dans le passé. C'est la raison pour laquelle, elles vont être différentes pour votre frère ou votre sœur ! Ce phénomène est également au coeur de la cure analytique. Pour le psychanalyste Daniel Lagache (1949), "Il s'agit essentiellement d'un déplacement d'une conduite émotionnelle, par rapport à un objet infantile, spécialement les parents, à un autre objet, ou une autre personne, spécialement le psychanalyste au cours du traitement".
A l'origine du transfert psychanalytique

Transfert psyLe transfert a d'abord été découvert par le psychanalyste autrichien Sigmund Freud (vers 1920). Préoccupé de savoir comment traiter ses patients hystériques, Freud utilise l'hypnose pour qu'ils puissent retrouver des souvenirs. En cherchant à faire revivre des émotions désagréables à l'origine de leur trouble, il s'aperçoit de l'importance de la relation avec ses patients.

Ces derniers semblaient projeter sur leur analyste des figures, des images de leur enfance…"Il définit le transfert comme un déplacement d'affect d'une personne à une autre, à savoir l'analyste" explique le psychanalyste J.-D. Nasio. Freud va alors l'utiliser pour faire émerger des émotions du passé, et en fait un des piliers de la psychanalyse.
Les vertus du transfert psychanalytique

Concept majeur dans l'ouvre de Freud, le transfert favoriserait donc le retour du trauma passé. Face à cette découverte, le célèbre psychanalyste met en avant les vertus thérapeutiques de cette relation particulière qui s'instaure entre le patient et l'analyste, au-delà même de l'interprétation psychanalytique, et des mots qui sont posés. Ce qui compte c'est la relation !
La présence de l'analyste joue le rôle d'un véritable agent thérapeutique. "A ce titre, une présence active du thérapeute peut nourrir positivement le transfert pour que le patient puisse se découvrir, mieux se connaître, et guérir" précise le psychanalyste. Les quatre principaux motifs de transfert seraient l'amour, le désir, la haine, et aussi l'angoisse, qui sont les plus présents dans le cadre de la cure.
L'excès de transfert psychanalytique

A la découverte du transfert va succéder une autre révélation : la possibilité d'une dérive dans le processus. Si le transfert facilite le bon déroulement de la cure et soulage la personne, un autre problème fait rapidement surface : l'excès de transfert. Aux émotions qui vont se reporter sur l'analyste, peuvent s'ajouter une réelle affectivité, le sentiment amoureux voire du désir. Le transfert pose alors problème. Un patient qui tombe amoureux de son analyste, c'est un transfert mal géré. Il est le signe d'un développement d'une hypertrophie de la relation, qui n'est pas souhaitable. C'est au thérapeute de signifier qu'il ne peut pas donner suite à un transfert de nature amoureux, ou érotique. La bonne gestion du transfert incombe au thérapeute qui doit être conscient de ce rapport particulier et être vigilant à ne pas encourager une dérive. Une relation patient/analyste qui s'oriente vers une relation amoureuse, un rapport sexuel ou un rapport haineux, représente un obstacle majeur à la guérison.

En réalité, le transfert est au cœur de toute relation patient/médecin, quelles que soient les nouvelles formes que prend aujourd'hui la thérapie. En tenir compte peut éviter bien des dérives. "La supervision, à ce titre, représente un précieux filet dont devraient se munir tous les équilibristes de la psyché" conclut J.-D Nasio, qui affirme que c'est un métier à haut risque, qu'une vigilance aigue et des gardes fous sont nécessaires.

Catherine Maillard

Créé le 05 mars 2013

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